
Voici deux ouvrages de Richard Vercauteren publié chez Cépaduès-Editions de Midi, 111 rue Nicolas Vauquelin, 31100 Toulouse.
Les trois chemins symboliques du Franc-maçon explore les parcours labyrinthiques possibles par la démarche maçonnique. Richard Vercauteren propose au lecteur des éléments d’un repérage afin de donner sens à une errance nécessaire qui peut se révéler créatrice. L’auteur insiste sur la responsabilité du Franc-maçon qui obtiendra des réponses à son intention profonde. La démarche initiatique maçonnique exige une dynamique nourrie par la plurivalence des symboles.
« Dans cet univers créé entre la complexité labyrinthique et la dynamique de la quête, le Franc-maçon finalise toujours son parcours au sein du Temple : c’est le lieu de rassemblement de tous les pièges et joies du chemin. Le Temple, comme « salle des cartes », lieu symbolique et du symbolisme par excellence, clarifie, autant que faire se peut, la lecture du chemin. Là, le Franc-Maçon passera entre les colonnes pour se retrouver avec ceux qui le reconnaissent et deviendront progressivement les repères de son parcours. »
Richard Vercauteren présente une typologie des chemins symboliques, chemin de la Liberté, chemin de l’Egalité, chemin de la Fraternité. Pour lui, « Le chemin de la Liberté forge sa philosophie humaniste et altruiste, que nous avons nommée ontologique. Dirigée vers la connaissance de soi et de l’Autre, cette philosophie ne peut avoir de signification que si elle s’intéresse à l’Homme et à la recherche de son bien-être. »
« Le chemin de l’Egalité s’inscrit dans la recherche d’un alter ego, c’est-à-dire celui qui a les mêmes préoccupations que soi et qui peut l’instruire par un savoir acquis. Cette égalité pose de fait le sens d’une recherche de l’Autre avec qui il va construire une entraide à la fois dans la différence et la complémentarité. »
« Le chemin de la Fraternité qui est gravé dans le Temple où se rassemblent les différences et les symboles qui forment les repères d’un langage commun. Cette affection qui unit les membres de la Loge pour former l’égrégore constitue l’aide essentielle pour que se poursuive le chemin. »
L’analogie et l’herméneutique vont permettre vont favoriser le mouvement de la quête, l’auteur parle d’une dynamique à la fois de lien et de transmission. Pour tendre vers l’utopie créatrice de la Concorde universelle, le Franc-maçon a besoin de s’inscrire dans un réseau de liens à la fois horizontaux et verticaux. Les ruptures deviennent alors des sources de renouvellement ou de restauration. La dynamique de la pensée devient une dynamique de vie et s’organise en véritable spiritualité.
Mythes et valeurs de la Franc-maçonnerie du XXIème siècle est consacré à la place des mythes dans la démarche maçonnique. Richard Vercauteren veut redonner aux mythes la place qui leur revient dans le procès initiatique, que cela soit les mythes fondateurs ou les mythes opératifs.
« Un mythe n’est jamais fait, rappelle-t-il, pour dire la vérité, mais pour donner les outils qui conduiront vers cette possible vérité. A travers ses mythes, la franc-maçonnerie propose un mode de lecture du monde en s’appuyant sur le langage spécifique des symboles. C’est ce qui lui donne sa puissance. Les symboles produisent, par définition, le langage le plus ouvert qui soit, car évolutif dans la mesure où chacun peut les enrichir. Le langage des symboles est celui que les mythes maçonniques utilisent, car c’est le seul qui s’adapte à toutes les époques. »

Si les mythes sont un véhicule privilégié des valeurs, celles-ci s’inscrivent dans un procès qui ne permet pas aux certitudes de s’installer durablement. Sans cesse questionnées, les certitudes ouvrent sur d’autres dimensions du sens. Cela conduit Richard Vercauteren à forger le concept d’ « atropie ».
« Le lecteur, nous dit-il, ne trouvera nulle part la signification de ce concept dans les sciences humaines et sociales, pas plus qu’en philosophie. Nous l’avons donc introduit pour signifier un chemin de quête qui se situe entre la réalité et l’utopie : le Franc-maçon poursuit un itinéraire ayant prise dans un quotidien signifiant, à la recherche d’un temps signifié. Dans la vie de tous les jours, il puise les éléments qui alimenteront sa spiritualité dont le sens est construit par l’incertain. Le doute du Franc-maçon marque ses pas hésitants dans sa quête de vérité pour que les valeurs qui l’alimentent dessinent sa finalité autour de la Concorde Universelle. »
Richard Vercauteren présente les rapports spécifiques entretenus par la Franc-maçonnerie avec les mythes, sachant qu’ils sont pluriels et varient selon les rites et les obédiences. Il distingue trois grandes dimensions qui spécifient les mythes maçonniques. La première réside dans les trois principaux univers utopiques maçonniques sur lesquels la légitimité de la démarche initiatique se fondent : au Rite Français, le Temple de Salomon, le Temple de Bethsaléel, l’Arche de Noé. La deuxième tient dans les acteurs de ses mythes qui posent les fondations, d’une civilisation, d’une société, de la loi… La troisième est celle de l’accès à la connaissance des mythes par chacun, à leur interprétation et leur mise en œuvre.
Richard Vercauteren consacre un chapitre à la question de la transmission comme mythe. C’est un regard très intéressant. La transmission n’est jamais assez interrogée. Est-elle un partage ou toute autre chose d’intime et vertical ? C’est à travers le mythe d’Hiram que la question est abordée, mythe qui reste le plus central et le plus partagé au sein de l’ordre maçonnique. Sans épuiser la question, immense, Richard Vercauteren envisage la transmission seulement dans le cadre d’une éthique stricte. Les valeurs, ou vertus, ne peuvent demeurer des objets extérieurs appréhendés intellectuellement, c’est seulement par leur intégration au quotidien, au plus proche de l’être, que le sens peut être transmis.