Fin
mars. Les hirondelles
de Luc-Olivier d’Algange
Editions Arma Artis.
Joseph Joubert, Henry Montaigu, René Guénon, Gustave Thibon, Dominique de roux, Gomez Davila, André Suarès, Ernst Jünger, Henry Corbin, Azîzoddîn Nasafî, Julien Gracq sont invités par Luc-Olivier d’Algange dans un théâtre de l’esprit aussi ambitieux que pédagogique. Si la pédagogie s’oppose traditionnellement à l’initiatique, Luc-Olivier d’Algange use d’une pédagogie du détour pour approcher ses esprits vivants à travers leurs œuvres puissantes. Il y a une initiation à Joubert, à Montaigu, à Guénon, quand la littérature se fait initiatique.
Chaque rencontre, portée par l’érudition certaine de l’auteur, demeure traditionnelle, non d’une tradition relevant de l’archéologie mais bien d’une tradition vivante. Luc-Olivier d’Algange invoque sans ambiguïté la liberté enchantée de la Tradition :
« La Tradition n’est pas immobilité mais traduction, interprétation infinie, scintillante rivière, elle ne peut être servie par des « cerveaux sombres » et des « esprits lourds ». Elle vient à nous par enchantement, par ce qui nous chante, par le suspens, dans l’apesanteur, qui est pure attente, claire attention : « Suspendue. Cette idée entre essentiellement dans toute idée d’enchantement. L’éclat y entre aussi. Et la légèreté, et le peu de durée. Ravissement est la suspension de l’âme. » La durée et la volonté sont des impiétés ; elle se substituent à l’éternité qui nous apparaît par éclats et à l’âme qui se meut par elle-même. L’âme est involontaire. Il en va de même dans l’art : « Il ne faut qu’un sujet à un ouvrage ordinaire. Mais pour un bel ouvrage, il faut un germe qui se développe de lui-même dans l’esprit comme une plante. » (…)
La vérité n’est jamais acquise, ni détenue, mais approchée. Ce qui interdira donc de la planifier ou de l’administrer de façon indue. »
Luc-Olivier d’Algange retient de chacun de ses traqueurs d’absolu l’essentiel, ainsi pour Guénon, sa métaphysique, et pour chaque vague soulevée, l’écueil toujours possible. Ainsi, toujours pour Guénon :
« L’exercice de l’entendement qu’exige la lecture méditante du Symbolisme de la Croix est sans doute, désormais, une plus sûre ambassade des mondes supérieurs de l’Intellect que ces rites et réunions, souvent puérils, qui loin d’accroître la limpidité intérieure nécessaire à la réception des Symboles, distraient par leur encombrement d'humanité l’entendement de son pur objet de fidélité et de connaissance. Il est bien naturel de chercher à être approuvé par certains de ses semblables dans la Quête de l’absolu. Encore faut-il ne point subordonner cette Quête à ce désir. »
A travers ses irruptions dans la pensée et l’écriture qui éveillent, Luc-Olivier d’Algange conduit le lecteur vers une certitude, non une vérité, la puissance des subversions initiatiques balaie la lourdeur des formalismes, même quand ceux-ci empruntent la forme initiatique.
« Toutefois, qu’un seul intercesseur survive ou que sa mission soit ressaisie par un vivant et le tour est démasqué ! Le retour en amont redevient possible, car ce que les Modernes nomment le passé n’est pas tant derrière nous qu’au-dessus. Ce qui appartient à d’autres temps, que l’on voudrait révolus, appartient à une autre temporalité que l’on ne saurait mieux définir que par le seul mot de présence. »
Editions Arma Artis, BP 03, 26160 La Bégude de Mazenc, France.