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Sorcellerie : Objets pour guérir, Objets pour maudire par Hugues Berton et Christelle Imbert. Collection Beaux Livres. Editions De Borée, 45 rue du Clos-Four, 63056 Clermont-Ferrand cedex 2.

www.deboree.com

Ce superbe livre témoigne de la tradition et des savoirs des Anciens à travers plus de 500 objets répertoriés que Hugues Berton et Christelle Imbert ont recueillis, de 1984 à 2007, dans les campagnes, au fil des rencontres et des enquêtes de terrain. C’est le troisième ouvrage qu’ils consacrent au sujet après Médecine et sorcellerie en milieu rural, formes et structures des thérapeutiques traditionnelles, chez Dangles en 2008 et Sorcellerie en Auvergne, déjà aux Editions de Borée en 1995.

Hugues Berton et Christelle Imbert sont passionnés d’ethnologie. Hugues Berton, chercheur, a fondé la Société d’Etudes et de Recherches des Survivances Traditionnelles, le SEREST qui a pour vocation la sauvegarde des rites et croyances. http://www.serest.org/

Nous leur devons aussi un livre remarqué, consacré aux rituels du Compagnonnage et de la Franc-maçonnerie, Les Enfants de Salomon. Approches historiques et rituelles sur les Compagnonnages et la Franc-maçonnerie publié en 2015 aux Editions Dervy.

Avec beaucoup de respect et d’attention à l’autre, Christelle Imbert et Hugues Berton rendent compte de modèles du monde traditionnels, toujours actuels, dans une volonté de partage, de préservation et de transmission de savoirs et pratiques anciens. Ces pratiques et ces objets associés ne doivent pas être approchés comme des curiosités mais comme des témoignages d’une permanence de traditions remontant souvent à plusieurs siècles.

« L’apparente humilité des objets « paysans », dès lors qu’ils sont sculptés de décors symboliques, ne saurait évacuer leur fonction principale : donner un sens aux angoisses que connaissent les humains face aux questions essentielles telles la souffrance, la maladie, la mort, et permettre de survivre dans les meilleures conditions possibles tant sur le plan temporel que spirituel. »

« Objets pour guérir » et « objets pour maudire » : un nom et deux verbes qui pourraient induire une vision restreinte des sujets abordés. Mais, précise les auteurs, « le fait de guérir implique un retour à l’unité primordiale et par conséquent ne relève pas d’un système dualiste ». Et « Maudire, c’est prononcer une parole annonçant un châtiment en punition d’une faute. C’est appeler sur un être ou une chose la colère divine, par le biais de paroles, c’est invoquer sur un être ou un objet la descente d’une influence spirituelle afin que se manifeste le mal qui a été et qui sera. Il y a ici une certaine idée de l’expression d’une justice, ne pouvant s’exercer par voie ordinaire ».

Ce qui apparaît comme une simple superstition présente bien d’autres dimensions, sociétale, philosophique, linguistique, mythologique, métaphysique et autres. L’objet lui-même, quel qu’il soit, est bien davantage que ce qu’il présente : « Par la manipulation de l’objet, l’être en souffrance réintègre tout un monde, celui de ceux qui l’ont précédé de génération en génération. L’objet est un lien, il permet de retrouver le lien avec sa société, de se ré-associer avec le point d’origine mythique, le divin thérapeute ».

L’enracinement social de ces objets porteurs d’histoires et de croyances nous apparaît dès lors que nous parcourons l’ouvrage. Loin de nous êtres étrangers, beaucoup nous sont familiers. Nos deux auteurs cherchent à établir le processus qui conduit du mythe à l’objet de croyance. Ils prennent en compte la notion essentielle de contenant et contenu que nous retrouvons dans beaucoup de mythèmes traditionnels. Ils établissent le lien entre la manipulation, le détournement de l’objet et ses fonctions superposées : « Lorsqu’ils sont détournés de la fonctionnalité pour laquelle ils sont été initialement produits, ces objets ne sont finalement qu’un moyen pour leurs usagers de se les approprier, de trouver en eux les correspondances en adéquation avec leurs formes et ainsi de les doter d’une identité singulière. »

Amulettes, talismans, livres, objets de protections ou autres sont autant d’indicateurs de notre sentiment de vulnérabilité et de faiblesse. Si les religions, notamment le christianisme, ont cherché dans leurs élaborations théologiques sophistiquées à circonvenir les pratiques populaires, celles-ci, parce qu’elles sont issues du quotidien, se sont adaptées pour perdurer, maintenant une forme d’intégrité individuelle face à l’adversité et assurant également la cohésion de la communauté, sans parler de médecines traditionnelles toujours aussi vivantes malgré les condamnations académiques.

Il s’agit donc d’un patrimoine, principalement immatériel mais tangible, que nous aurions tort de négliger. Il fait partie de nos héritages, de nos cultures et contribue à une meilleure connaissance de nous-mêmes. En découvrant au fil des pages, à travers des objets plus ou moins communs mais aux fonctions peu communes, les croyances induites, les mythes qui les ont tissées, les mécanismes psychologiques à l’œuvre, les systèmes de valeurs, les modèles du temps et d’autres spécificités de la complexité humaine, c’est bien une quête de sens qui se dessine.

Sommaire :

L’objet dans toutes ses magies : Introduction – La notion d’objets – La Tradition et le Mythe d’origine – Du mythe à l’objet de croyance – Contenants et contenus – Des objets chargés de sens… – Qui peut le bien peut le mal… – L’utilisation des objets de savoir et de pouvoir.

Savoir se protéger : Amulettes, talismans, porte-bonheur, monnaies de protection.

Christianisme : de la religion officielle à la religion populaire : De la Bible à la théologie officielle – De l’oral à l’écrit : bon et mauvais livres – Reliques –La thérapie par les saints – Le temple chrétien et la pierre d’autel – Cultes de saints guérisseurs.

Objets de protection dans la demeure paysanne : Objets détournés – Protections extérieures – Le Feu – Le Joug – Le Sel – Le Pain – Le Beurre – La Table – Protections diverses – Filage et Tissage – Dentelle – De l’Angoisse à la Mort.

De la Divination aux Maléfices :

Objets de divination : Les méthodes de divination de l’antiquité à nos jours – L’objet de divination en tant que support de perception – Le Miroir – Le Tamis et les Forces – La Baguette et le Pendule – La Tache d’encre – Cartes et Tarots.

Objets maléfiques : Acquérir le pouvoir – Grimoires – Leveur / jeteur de sort – Objets pour maudire et malfaire – Entre protection et intimidation : les Cannes.

De la protection vers la Guérison de l’Âme et du Corps :

Objets de protection, de guérison et de croyances : Cause des maladies dans la pensée traditionnelle – Théorie de la signature, analogies et transfert – Plantes – Animaux – Pierres magiques et guérisseuses – Un trésor méconnu : les pierres à venin en Velay / Vivarais – Conjurations.

Conclusion.

Bibliographie. Index. Notes.

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