La Voie hermétique de Françoise Bonardel, Dervy poche.
Nous retrouvons en poche l’édition du presque classique et en tout cas nécessaire travail de Françoise Bonardel sur l’hermétisme. Si le livre obéit aux règles de l’académisme, le souffle d’Hermès n’en est pas absent comme en témoignent les dernières lignes du livre :
« Que ne fut pas en effet l’hermétisme ? Une révélation prophétique, une tradition magico-religieuse, une pratique de la transmutation, une Science intégrale supposée synthétique, un art de l’interprétation… Est-ce à dire que « le vieil Hermès, père de toutes les voies hérétiques détournées, a toujours raison » ? Hermès ne serait qu’un génie pervers s’il s’était ingénié à conjuguer détournement hérétique et rationalité dogmatique ! C’est à sa manière qu’il a toujours « raison », par son art de dissoudre et de coaguler ; par sa maîtrise des pondérations et son habileté, en effet inimitable, à faire soudain renaître du sens, tel le Phénix émergeant de ses cendres. »
L’intuition poétique n’est pas absente de ce travail rigoureux qui vise à mettre un peu d’ordre et de rationalité dans l’empirisme hermétiste, d’abord en en précisant le langage et en évitant l’emphase souvent présente dans les écrits comme les réductions courantes à ce sujet.
La première partie de l’ouvrage est intitulée La révélation d’Hermès. Elle traite des origines, mythiques et historiques, de la révélation hermétique elle-même et de ses paradoxes, de la « compréhension » hermésienne. La seconde partie aborde la question de La tradition hermétique, la renaissance hermétiste, l’art d’Hermès, l’équivoque occulto-hermétiste, l’hermétisme et les herméneutiques. Médiation, révélation, occultation, sont au cœur de ce parcours.
La lecture de l’essai permet de se repérer dans le dédale des détours hermétistes, de s’appuyer sur des grands auteurs de référence, et d’appréhender peu à peu ce qui n’est pas un modèle du monde parmi d’autres mais une vision intemporelle qui se veut opérative, trouvant, entre deux phases d’occultation, dans la situation même, matière à se renouveler. Hermès est frappant dans sa compétence à inclure ce qui se présente dans le jeu permanent des miroirs de l’être sans jamais hypothéquer la possibilité de l’Un.
Françoise Bonardel pose des jalons historiques sans jamais tomber dans l’historicité qui englue tant de chercheurs. Elle clarifie les concepts qui permettent de penser l’hermétisme et fait donc œuvre utile. La question d’une épistémologie de l’hermétisme reste posée. Elle le restera, ceux étant en mesure de l’établir n’en voyant pas l’intérêt.
Editions Dervy, 22 rue Huyghens, 75014 Paris.