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Les agapes maçonniques. A quoi ça sert ? de Fabrice Bernard. Editions Dervy, 19 rue Saint-Séverin, 75005 Paris, France.
Voici un excellent travail sur les agapes, souvent considérées comme un simple moment de convivialité et de fraternité alors qu’elles portent une dimension initiatique.
Il est toujours intéressant dans les ouvrages de cette « Collection qui pose des questions » d’entendre les questions posées avant de s’intéresser aux réponses, elles témoignent d’une pensée : « Peut-on écrire une recette pour les agapes ? L’espèce humaine ne pense-t-elle qu’à manger ? Passer du repas aux agapes, est-ce changer de plan ? Les agapes appartiennent-elles à un processus initiatique ? Comment préparer et organiser les agapes ? Existe-t-il une spécificité liée aux agapes maçonniques ? Les agapes s’ouvrent-elles vers des directions spirituelles qui vont au-delà du perceptible ? Doit-on sacraliser les agapes ? Agapes indispensables ou simplement nécessaires ? Pourquoi des agapes dans le monde connecté du « distanciel » ? »
Les agapes unissent la substance et l’essence note Fabrice Bernard. La convivialité n’exclut pas, bien au contraire, la spiritualité. Si le repas, comme acte social, est convivial, les agapes ouvrent sur une autre dimension. Le partage proposé ouvre sur la rencontre et l’apprentissage.
La référence au repas de Jésus et des disciples permet de penser la spiritualité des agapes :
« Dans certains de nos repas, il y a aussi cette signification perceptible qui s’offre comme annonciatrice d’un signifiant propre à chacun pour lui permettre de s’élever vers plus de spiritualité. La nourriture dans les deux cas est interprétative. Elle doit se vivre à la fois comme présence mais aussi comme dépassement. Présence, puisque le Principe est partout et nulle part. Il est libre de se nicher dans toutes les victuailles qui vont nous nourrir, nous proposant une liaison possible. Dépassement, car il faut percevoir cette nourriture comme faisant partie d’un Tout auquel nous sommes reliés comme acteurs et récepteurs. Acteurs, car nous dévorons cette nourriture riche du Principe. Récepteurs, car en l’ingurgitant, nous pouvons donner puissance à ce Principe en nous, comme lien du plus petit au plus immense en sachant que naturellement nous devrons nous situer au-delà. »
Que les agapes soient ritualisées ou non, la dimension du sacré est présente, d’abord par la conscience des participants de ce qu’ils font. Le Principe, rappelle l’auteur, peut se vivre partout.
Si Fabrice Bernard envisage les agapes dans la perspective la plus haute, sans ostentation, il répond aussi aux questions le plus pratiques : organisation, choix des mets, durée, prix, placement, sans oublier les santés, hommages ou rappels.
La recherche d’un juste milieu, d’un équilibre entre nourriture de l’esprit et nourriture terrestre conduit l’ensemble du propos. S’il s’agit bien, toujours, de traverser l’apparaître en quête de l’essence, le fait d’inscrire cette démarche dans le geste le plus commun, le plus partagé, du repas, permet d’installer les qualifications acquises dans le Temple au cœur même de la vie quotidienne.