Le souffle d’une vie de Guy Aurenche, Editions Albin Michel.
Tous ceux qui ont eu l’opportunité de travailler avec Guy Aurenche reconnaissent la force et la permanence de son engagement dans le domaine des droits de l’homme, engagement sur le terrain mais aussi sa contribution à la pensée des droits de l’homme, leur évolution et leur application.
Dans ce livre, Guy Aurenche rend compte des modalités multiples de cet engagement comme avocat responsable de l’ACAT, Action des chrétiens pour l’abolition de la torture ou aujourd’hui du CCFD-Terre solidaire, le Comité catholique contre la faim, ONG bien connue.
Si l’ouvrage apparaît comme un bilan, une mise en perspective, il introduit aussi au futur. S’appuyant sur sa longue expérience, Guy Aurenche offre une matière à ceux qui veulent s’engager aujourd’hui pour davantage de justice dans le monde.
Il dégage ainsi de la problématique des droits de l’homme quelques axes pédagogiques fondamentaux :
Une « transcendance », non religieuse, découle des droits de l’homme et de la reconnaissance de la dignité et de la valeur de la personne humaine. Il voit là un « mystère », là encore non religieux, que l’éducateur ne doit avoir de cesse de faire approfondir. « Tout pouvoir, quel qu’il soit – politique, militaire, religieux, économique, culturel…-, est limité par le service qu’il rend au respect de la dignité humaine. »
Une redécouverte de la règle et de l’organisation juridique, de la parole donnée, comme contributions à une société équilibrée. La réciprocité entre droits et devoirs, indispensable pour faire des idéaux des droits de l’homme, « minimum vital de la politique », une réalité sociétale.
L’élaboration d’une pédagogie du choix, prenant en compte la complexité des droits de l’homme, les processus et les ajustements qu’ils impliquent. Si les droits de l’homme ne sont pas universels, ajoute-t-il, ils ont vocation à le devenir.
« Le respect effectif des droits de l’homme se fera sous le regard des autres, Etats ou partenaires, qui ont signé les mêmes textes. ceux-ci nous invitent à la pédagogie du droit de regard et du devoir d’interpellation, qui veut réagir contre une neutralité passive. »
Dans sa préface, Stéphane Hessel rappelle d’ailleurs, inlassablement :
« Voici mon appel au jeune : ayez la capacité d’indignation, voyez ce qui vous scandalise dans le monde, et utilisez votre jeunesse et votre dynamisme pour lutter. Ne soyez ni indifférents ni découragés, engagez-vous ! Dans cette exigence, l’action nécessaire se doit d’être en lien avec la pensée, l’analyse et les convictions. Nous devons comprendre ce monde pour justement dépasser ce qui, en lui, fait scandale. »
Guy Aurenche fait prendre conscience au lecteur que les droits de l’homme, ni utopie, ni vérité, sont un outil, juridique certes, mais aussi politique, social, économique et culturel dont le citoyen peut et doit s’emparer pour édifier le monde qu’il veut.
« Les droits de l’homme sont l’un des signaux d’alarme de l’humanité. Ils ont donné une ligne directrice aux peuples du monde en proclamant comme valeur commune les mots « partage » et « coopération » et en les appliquant sur le plan économique, politique, agricole, financier ; en montrant que l’interculturel n’était pas simplement une élucubration de quelques philosophes ou religieux en mal de publicité, mais une vraie occasion de découverte mutuelle et d’enrichissement. les textes des droits de l’homme, par-delà leur rigoureuse froideur juridique, nous invitent, individuellement et collectivement, à trouver le chemin de notre dignité, dans les mots de nos cultures. »
Si Guy Aurenche fonde son travail sur son expérience de chrétien, il en appelle, de manière fort judicieuse, à une grande alliance des sources, de ce qui pousse des êtres humains à tendre vers un monde meilleur.
Editions Albin Michel, 22 rue Huyghens, 75014 Paris.