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La belle histoire des Maths de Michel Rousselet. Editions De Boeck supérieur.
Dans cette magnifique collection, nous avons déjà eu La belle histoire de la physique, La belle histoire du cerveau ou encore La belle histoire de la voix, quelques exemples d’ouvrages qui modifie notre rapport à des sujets jugés difficiles et qui deviennent simplement de « beaux » sujets. Les mathématiques sont un langage universel qui fascine, exalte ou… effraie. Michel Rousselet, enseignant de mathématiques, est familier des difficultés que nous entretenons avec cette science majeure. Le voyage temporel dans lequel il nous conduit permet d’inscrire notre rapport aux maths, qu’il soit initialement agréable ou désagréable, dans une grande histoire, vite passionnante.
Si les mathématiques, nous dit-il, ont véritablement commencé vers 600 av. J.C. avec « le miracle grec » date à laquelle « On ne se contente plus dénoncer des résultats, on les démontre. », les systèmes de numération les plus anciens, mésopotamien et égyptien, datent de plus de 5000 ans, comme l’écriture. La géométrie suit de peu.
Il est intéressant de comprendre que les mathématiques ont rapidement échappé au simple champ de la résolution de questions pratiques :
« Pythagore, par exemple, nous rappelle l’auteur, étudiait les propriétés des nombres entiers sans soucis d’applications possibles. Les géomètres grecs ont tenté de résoudre des problèmes difficiles, comme la quadrature du cercle par exemple, sans se demander à quoi cela pouvait servir. Les courbes nouvelles qui résultent de leurs travaux ne trouveront d’ailleurs « leur utilité » qu’au XVIIème siècle avec Galilée, Kepler et Newton. »
Cette autonomie, voire cette liberté, propre aux mathématiques, a sans doute permis des apports majeurs, notamment à la physique qui, sans les mathématiques, aurait fini par stagner.
La première partie de l’ouvrage couvre cette longue période jusqu’à la fin du miracle grec, soit les travaux de Claude Ptolémée vers 140 de notre ère. Le lecteur découvre beaucoup de choses qui étonnent : les fractions égyptiennes (en – 3000), les fractions et racines carrées à Babylone (en – 1800), la géométrie babylonienne (en – 1300), le théorème de Pythagore en Chine (en – 1000), etc.
La deuxième partie traite de l’époque médiévale, depuis la chute de Rome jusqu’à la fin du XIVème siècle. Michel Rousselet évoque entre autres l’invention des nombres négatifs (en 700) et développe l’apport considérable de la civilisation arabo-musulmane :
« Les savants arabo-musulmans ont fait beaucoup plus que traduire les traités scientifiques des savants grecs, persans ou indiens. Ils ont certes emprunté leurs chiffres et leurs techniques de calcul aux Indiens, mais ils les ont vite dépassés en inventant les nombres décimaux et les fractions décimales.
Cependant, leur contribution la plus importante a été l’invention de l’algèbre. »
Avec la Renaissance européenne, nous assistons également à « une renaissance des activités mathématiques en Europe », notamment en Italie. Ainsi, Luca Pacioli publie à Milan entre 1496 et 1498 le célèbre ouvrage De divina proportione. Il traite de l’usage du nombre d’or, non seulement en géométrie mais en peinture et en architecture. Les questionnements sont multiples, ils accompagnent la période des Découvertes par le Portugal et le renouveau de l’astronomie avec Copernic. Les représentations du monde sont bouleversées.
Mais c’est au XVIIème siècle que les mathématiques vont connaître un nouvel âge d’or avec la création des logarithmes, la géométrie analytique de Descartes et Fermat, les premiers principes des probabilités ou la construction du calcul infinitésimal (Newton/Leibniz).
Les possibilités offertes par le calcul infinitésimal vont marquer le siècle suivant. Les mathématiques vont se révéler indispensables en physique comme en astronomie, mais aussi en optique, cartographie, balistique… Les mathématiciens deviennent des professionnels officiellement financés par des académies.
A partir du XIXème siècle, les mathématiques vont prendre une place de plus en plus considérable dans tous les domaines, avec en corollaire, le besoin renforcé de rigueur et de vérification.
Le XXème siècle verra l’apparition de théories nouvelles comme la théorie des ensembles, la théorie du chaos, la géométrie fractale mais aussi la démonstration d’hypothèses très anciennes (Kepler ou Fermat…). L’informatique multiple les possibilités de calcul et d’investigation.
Il ne faudrait pas croire ce voyage fastidieux car du code secret de Jules César au Rubik’s Cube, passant par la mode du casse-tête ou le dessin d’un hypercube, nous sommes souvent intrigués.
Notre monde est mathématique et ce que démontre cet ouvrage, c’est la beauté des mathématiques. L’iconographie superbe qui accompagne le propos de Michel Rousselet en est une démonstration, par exemple avec « la géométrie imaginaire » de Lobatchevski et ses magnifiques pavages hyperboliques.
La science des mathématiques est aussi un art.
De quoi rêver et changer notre vie !