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Plus malin que le Diable de Napoléon Hill. Le secret de la liberté et du succès, écrit en 1938, révélé aujourd’hui, Aska Editions.
Ce livre est typique de la psychologie nord-américaine de l’entreprenariat et de la création. Nous sommes souvent surpris de la capacité de la société américaine à créer, développer, renaître de ses cendres que cela soit dans le domaine de la recherche, du sport, de l’entreprise ou de la géostratégie.
Cette psychologie de l’entreprenariat, cette dynamique de vie, organisée autour d’une volonté de « pensée positive » nous paraît parfois, de ce côté-ci de l’Atlantique, naïve, simpliste, voir ridicule. Pourtant, son efficacité demeure, peut-être en raison du pragmatisme qui en découle et de la capacité à voire les choses telles qu’elles sont pour mieux s’en saisir ou encore à reconnaître ses propres conditionnements pour les dépasser.
Napoléon Hill est très connu aux USA depuis la parution de son best-seller, Réfléchissez et devenez riche. Nous sommes alors dans les années 30, les USA se remettent de la crise de 1929, qui a bouleversé les certitudes du peuple américain. En 1938, Napoléon Hill affirme avoir décrypté le « code du Diable », c’est-à-dire les voies empruntées par le Diable pour conduire les individus et les peuples à la ruine et surtout à l’esclavage. Il rédige ses conclusions dans un manuscrit jugé trop subversif pour être publié à l’époque. C’est ce manuscrit qui, soixante-dix ans après sa rédaction, est disponible pour la première fois des deux côtés de l’Atlantique.
Napoléon Hill a choisi la métaphore théâtrale d’un dialogue entre lui-même et le Diable pour transmettre un art de vivre basé sur la lucidité envers soi-même et autrui. Sharon Lechter, annotatrice du texte, pense que la puissance du texte ne pouvait se déployer qu’à notre époque, que ce texte est fait pour bousculer nos croyances de début de 3ème millénaire. En réalité, Napoléon Hill met en évidence des principes toujours à l’œuvre chez ceux qui réussissent, que cela soit dans l’art de la guerre, la séduction, l’aventure ou l’innovation. Lire attentivement ce livre, d’une grande originalité dans la forme et le propos, permet de comprendre la pensée nord-américaine dans sa créativité et aussi dans ses excès.
Le livre est accompagné d’un CD audio qui reprend une partie des dialogues entre l’auteur et le Diable, les chapitres III et IV. Charles Antoni prête sa voix profonde, chaude ou inquiétante à souhait, au Diable évidemment. A l’occasion, Charles Antoni a dû se rappeler que, plus jeune, il fut l’un des acteurs fétiches du Théâtre du Soleil d’Ariane Mnouchkine. Nous vous conseillons d’écouter le CD avant de vous engager dans la lecture, cela facilitera votre rencontre avec ce Diable-là, qui nous ressemble tant.
Napoléon Hill dit avoir arraché sept principes secrets au démon afin de nous aider à triompher de lui. Par exemple :
« Dériver est la cause la plus commune de l’échec dans tous les milieux sociaux. Je peux contrôler à ma guise tout un chacun, dès lors que je peux l’inciter à prendre l’habitude de dériver sur quelque sujet que ce soit. La raison en est double. Premièrement, le dériveur peut être réduit à une poignée de glaise entre mes mains, prête à être modelée à la forme de mon choix parce que la dérive détruit le pouvoir de l’initiative individuelle. Deuxièmement, le dériveur ne peut pas accéder à l’aide de mon opposition, parce qu’il n’est pas le moins du monde attiré par quelque chose de si mou et inutile. »
Parmi les antidotes à la « dérive », nous trouvons : penser par soi-même, façonner le temps, hiérarchiser ses besoins et ses désirs, définir avec précision des objectifs et s’y consacrer, etc. L’idée de précision revient très souvent dans les propos du Diable. Elle s’oppose à l’incertitude, au doute, au flottement, à la procrastination. L’une des parties les plus intéressantes de l’ouvrage est celle consacrée aux peurs dont les racines sont analysées avec pertinence.
Le propos de Napoléon Hill est une défense de la démocratie. Il dénonce les conditionnements imposés aux enfants dans les écoles, les enseignements toxiques des églises, la propagande des médias, l’irresponsabilité des décideurs. Il propose aussi une forme de spiritualité laïque qui contribue à sortir du torrent des conditionnements pour édifier sa propre liberté. Il oppose le rappel de soi au manque de discernement et de prudence. La richesse dont il parle n’est pas nécessairement matérielle, elle réside plutôt dans la capacité de choisir, d’aimer et d’être aimé librement et parfois « d’échouer avec talent ». Il propose une éthique.