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Les 33 degrés écossais et la Tradition de Georges Lerbet, Editions Dervy.

C’est la troisième édition de cet essai à la fois original en son traitement et rigoureux sur le plan traditionnel. En effet, nous pourrions légitimement nous inquiéter d’une approche historique et sociologique. Le risque de vider la dimension traditionnelle de son sens, de sa poésie et de son opérativité est grand. Nombre d’études historiques stérilisent leur sujet. Georges Lerbet évite cet écueil grâce à son expérience maçonnique, la qualité et l’ouverture de sa pensée, non dogmatique, et une belle écriture.

Sa démarche tient en quatre points :

« 1 – On lit des faits (ici ce sont des textes sur le REAA et sur la Tradition).

2 – On cherche à dégager une cohérence et, si on la trouve, on donne une réponse affirmative à la question posée initialement.

3 – On livre cette cohérence, non pas comme une vérité mais comme un discours raisonné, vraisemblable et réfutable.

4 – Si le discours ne résiste pas à une réfutation mieux organisée et plus cohérente – donc plus forte -, on le rejette sans autre forme de procès. Et ce sera ce nouveau discours plus fort et plus cohérent (par exemple celui qui soutiendrait, preuves à l’appui, que le REAA est un montage désordonné) qui deviendra le plus vraisemblable. »

Mais, il ajoute cette précision essentielle :

« Le plus vraisemblable mais pas davantage le plus vrai. Parce qu’il nous paraît impertinent voire dangereux d’avoir pour ambition la quête du vrai en dehors de la vie intérieure, de la connaissance intime et personnelle. »

Avec cette approche, à la fois sage et scientifique, systémique et analytique, Georges Lerbet peut s’attaquer à la question :

« Le Rite Ecossais Ancien et Accepté est-il un rite autonome et cohérent ou bien peut-il se réduire à une simple construction hétéroclite qui se serait arbitrairement montée durant la seconde moitié du XVIIIème siècle ? »

Si le REAA a, comme il le remarque, « mis près d’un siècle à prendre sa forme actuelle et que, depuis plus de deux cents ans, il a su la conserver ? », cette cohérence est-elle endogène ou bien tient-elle seulement dans le rapport qu’entretient le Franc-maçon du REAA avec le rite ? Georges Lerbet pose au cœur de son travail la question de l’initiation qu’il envisage à travers plusieurs sens :

« Il existe au moins deux sens à l’initiation. L’un, objectif, porte sur les choses et sur les événements primordiaux. Et l’autre, subjectif, concerne ceux qui naissent à la Tradition en intégrant ces connaissances primordiales.

Deux sens donc à l’initiation, mais, peut-être bien aussi un troisième, par une sorte de nécessité d’équilibre. Ce sens-là est inscrit dans le contenu même de l’initiation. Il concerne ce sur quoi elle porte de façon immédiate. Cela veut dire qu’il s’agit des contenus de l’initiation, c’est-à-dire les contenus qui expriment ces choses et ces événements primordiaux arrivés jusqu’à nous.

Cette initiation-là porte sur un code. On s’initie au code pour pouvoir interpréter au mieux, de son mieux, en son temps et où l’on est, ce qu’il convient de tenter de comprendre.

Un code transmis. Tel est le contenu pratique de l’initiation. Et un code double. Un code symbolique. Un code qui veut dire des choses. »

Ce code a une dimension opérative. Il conduit à des praxis nécessaires, constitutives d’une quête de la gnose par un ésotérisme à explorer.

Temps et espace initiatiques, nombres et lettres, géométrie traditionnelle, couleurs et formes constituent les éléments d’un langage qui participe tant de la construction du monde que de la reconstruction de l’être en sa réalité originelle.

Des premiers pas de l’apprenti jusqu’à la queste du magistère, ce voyage dans les arcanes du REAA est passionnant. Une cohérence du mystère se dessine sans être affirmée. Elle est ainsi créatrice et apparaît non comme un donné mais comme un procès qui ne peut être appréhendé et mis en œuvre que dans un rapport métaphorique, spiralaire et, nous dit l’auteur, « génial ».

Cet essai n’est pas seulement intéressant, il est indispensable. Il démontre que la rigueur de pensée n’assèche pas nécessairement la source poétique et opérative de la Tradition, que les pratiques traditionnelles, indispensables, peuvent nourrir et se nourrir d’une interaction avec une pensée pluridisciplinaire, globalisante et intégrative.

Editions Dervy, 19 rue Saint-Séverin, 75005 Paris, France.

http://www.dervy-medicis.com/

Tag(s) : #Tradition
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