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L’agneau de chambre par Odile Cohen-Abbas, Editions Rafael de Surtis.

        Ce livre est un pur diamant de littérature transgressive.

Odile Cohen-Abbas, de son écriture ciselée comme un palais arabe à contre-jour, obsédante et envoûtante, donne vie à des personnages qui possèdent le lecteur. Lia, prostituée sacrée et sainte de la luxure, s’emploie à une charité sexuelle décalée. Sauvant les âmes avec son bas-ventre, elle se réalise en donnant vie à Got, l’homme universel, fécondée par le Soleil. Cette « christologie » solaire nouvelle emporte le lecteur dans un tourbillon où se mêle l’insupportable et l’extatique. Une expérience en tous les cas et un livre qui consacre son auteur !

         « Elle s’incline devant les statues revêches, ses yeux ouverts au talisman permis, elle a double rêve, deux nuances de tête, et sa voix et ses mains peu à peu, en elle se détruisent. Elle pense qu’un homme est une arche, un pont valide ; elle prise le courant, le liant de ces pierres, elle sent venir l’instant du rite, d’une fleur, de la chute d’urine, d’un toast, d’un dîner acide offert à la terre.

         Ses cuisses luisent doucement sous la robe, se fendent en peluche de cygne. Elle ne porte ni bas ni culotte. Les statues la gainent d’un charme impur et doux. L’eau de la vasque les apprête, frappe faiblement à leur tête, les sonde dans un reflet vivant.

         Lia écarte l’une et l’autre jambe. Se déprend distraitement d’un sillon amoureux. Sa vulve gracile et veule pourrait se jeter dans le vide. Déjà bat dans son souffle son délassement nerveux. Campée devant le bassin, parmi la vasque sèche et silencieuse, Lia fait couler de ses cuisses les germes et les fastes liquoreux de ses amants. Jusqu’à la dernière goutte d’un feu enfourché dans ses plis.

         Elle sépare l’une et l’autre jambe comme la douleur lui a appris, patiente. Et sa robe nouvelle sous les cimes sans soleil revêt des maigreurs obscènes. Elle entaille, décime la pesée de l’ombre. Elle sait que son ventre, que ses hanches n’ont plus de prix, qu’elle s’est rendue libre en sa nuit interdite, en sa flasque éloquence d’amour. »

Editions Rafael de Surtis, 7 rue saint-Michel, 81170 Cordes sur Ciel.

Tag(s) : #Avant-gardes
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