Clefs secrètes de l’œuvre de Nostradamus de François Trojani. Editions du Cosmogone, 6 rue Salomon Reinach, 69007 Lyon.
François Trojani (1936-2023) aurait sans doute été très heureux de cette belle édition en reliure rigide de ses études sur Nostradamus.
Il y a plus de cinquante années, François Trojani a reçu en dépôt un ensemble de textes traitant des Centuries de Nostradamus sous l’angle d’une science des nombres.
« Ayant souvent le sens d’écriture secrète, écrit-il, d’art consistant à chiffrer et à déchiffrer les messages entre les individus, la science des nombres a eu aussi pour but la connaissance des mouvements de « flux énergétiques » que nous transmettent la terre et le cosmos. Ainsi, dès la plus haute Antiquité et de générations en générations, cette science des cycles et des nombres s’est transmise, dissimulée le plus souvent dans les livres sacrés ; le but étant de comprendre, de prévoir et si possible de gérer les rapports et les possibles influences de ces nombres sur le devenir de civilisations. »
François Trojani n’a pas accordé une grande importance à cet ensemble pendant plusieurs décennies. C’est dans la dernière partie de sa vie qu’il s’est replongé dans cette science des nombres et a pu explorer le dépôt en question pour y découvrir une thèse inattendue :
« Elle développait l’idée que les événements et bouleversements divers et futurs que décrivent abondamment les ouvrages du Prophète n’étaient consignés que comme des sortes de « repères », des supports, en vue d’une mystérieuse théurgie, analogue à celle dont il est fait en partie référence dans les deux premiers vers de ses Centuries et dans le Quatrain latin. En fait, le Prophète n’avait consigné tous ces faits à venir que pour préciser à quelques-uns seulement, dans le futur du temps, un ensemble d’événements afin, que munis de ces clefs, ils essaient de remédier, par des mystérieuses et secrètes pratiques, à certaines des dérives de « l’histoire ». »
François Trojani indique que plusieurs notes font référence à Martinès de Pasqually.
Il a tenté de synthétiser et organiser les notes et documents reçus de façon plus lisible sans, dit-il, « prétendre être parvenu à rendre cet exposé cohérent ». Il invite aussi le lecteur à se tourner vers la géométrie, toujours en rapport avec les nombres. Nous retrouvons là un principe présent chez Pierre Vicenti Piobb, dont les enseignements, et les inédits consacrés à Nostradamus, étaient familiers à François Trojani.
Il s’agit donc de « se souvenir du futur », une idée très lusitanienne depuis le Padre Antonio Viera. D’ailleurs, un chapitre est consacré à Wronski et la sphère armillaire, si présente dans les traditions et l’histoire du Portugal. L’ouvrage nous plonge dans le jeu de miroirs des nombres mais aussi des lettres avec les cascades de sens de l’hébreu. Ce n’est pas qu’un ouvrage de numérologie sacrée, c’est beaucoup plus, un enseignement traditionnel certes incomplet mais rassemblant une multitude de pistes étayées par l’érudition de François Trojani. Il s’agit dit-il « d’un autre alphabet et d’une autre grammaire », d’une « autre lecture » par conséquent, qui révèle une métaphysique qui structure nombre de traditions occidentales comme orientales.
Une fois de plus, François Trojani témoigne. Il n’écrit jamais sans intention et sans Orient. En publiant ces éléments, il les préserve, certes, mais il les inscrit aussi remarquablement, et avec sa modestie habituelle, dans un tableau traditionnel rigoureux. Au lecteur de s’approprier ce langage.