Promenades dans les souvenirs maçonniques d’un ancien Grand-Maître par Guy Roman.
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Si vous souhaitez découvrir les dysfonctionnements de la Franc-maçonnerie mais aussi quelques raisons d’espérer (très peu en fait), ce livre vous intéressera.
Guy Roman assura deux mandats de Grand-Maître de la Grande Loge Mixte Universelle, 2007-2008 puis 2010-2013. Cette obédience fut fondée en 1973 par trois loges issues du Droit Humain. Elle se définit comme « à la fois mixte, libérale, laïque, progressive et démocratique ». Elle s’inscrit donc dans la cadre de la Franc-maçonnerie libérale et se veut adogmatique, ce qui ne protège pas des habituelles vicissitudes humaines.
« Chaque médaille, écrit Guy Roman, possède son revers, chaque parole contient sa fureur. J’ai dû rapidement affronter l’hypocrisie, la petitesse, la bêtise gratuite, l’envie et surtout les dérives financières et morales de certains conseillers de l’ordre. Ils ont assombri l’éclat de l’éthique maçonnique et sont devenus mon soleil noir… »
Le livre alterne les témoignages de l’auteur sur sa vie à la tête de l’obédience, notamment les nombreuses difficultés rencontrées et des contributions sur de multiples sujets de société. Parmi eux, citons : l’école de la République, la question de l’eau, défense de la loi de 1905… Mais Guy Roman aborde aussi, à sa manière, quelques sujets symboliques, par exemple sur le tapis de loge, la parole perdue ou encore le pain et le sel. Nous croisons aussi quelques personnalités comme Marcel Conche ou Serge Moatti.
L’ensemble forme une curieuse mosaïque, mosaïque de vie, avec ses moments d’amitié et de fraternité et aussi des violences qui ne devraient pas être dans un ordre à prétention initiatique, même inscrit dans le courant maçonnique dit « libéral ».
Le lecteur comprend la souffrance de l’auteur confronté aux atteintes répétées des valeurs maçonniques et à la perte de vue du projet initiatique. La plupart des Grands-Maîtres et Grandes-Maîtresses, toutes obédiences confondues, traversèrent les mêmes épreuves. Peu d’entre eux osent l’évoquer aussi clairement que Guy Roman qui n’hésite pas à mettre en avant les fourberies, les trahisons, les malversations. Nous pouvons nous demander s’il a raison de jeter sur la place publique les turpitudes maçonniques. Fallait-il aller jusqu’à classer les « Francs-maçons dérisoires », comme il le fait, en « illuminés, donneurs de leçons, envieux et venimeux » ? Chacun jugera à la lecture de l’ouvrage. Remarquons toutefois, que régulièrement, la presse ne se gêne pas pour rendre compte des dysfonctionnements maçonniques et que partir de la réalité, aussi déplaisante soit-elle, est sans aucun doute plus efficace que de dissimuler des faits, des comportements, qui dérangent.
Guy Roman finit par démissionner de la Franc-maçonnerie. Une décision nécessaire et cependant difficile en raison de son attachement à l’ordre maçonnique et ses valeurs. Il constate, surtout, comme beaucoup d’autres, l’échec de la Franc-maçonnerie devenue une coquille vide, le simulacre ayant étouffé le processus initiatique.
« Les loges à l’image des obédiences ronronnent dans leur coin et rien ne débouche sur des actions fortes et lisibles dans la société. L’étoile flamboyante a perdu de sa splendeur, elle s’est muée en un astre éteint qui ne guide plus personne. »
Reste quelques amitiés et moments de fraternité. Est-ce suffisant ?